top of page
Rechercher
  • Jean Dusaussoy

Cognac & Caviar / Armen Petrossian

(Première parution dans En Magnum #6)

Si l’on vous dit caviar, vous penserez sûrement vodka pour l’y associer, champagne peut-être, saké pour les plus aventureux, mais certainement pas cognac. Un accord inédit dont nous proposons la genèse avec le tzar du caviar, Armen Petrossian, président de la maison éponyme.

Tout a commencé à Cognac en janvier 2014 où, invité à un atelier sur les accords organisé par le BNIC (Bureau National Interprofessionnel du Cognac), se souvient-il, « le VS frappé (ou Frozen) avait trouvé une bonne liaison avec le caviar et cela à été une des surprises de ces journées car a priori personne n’aurait pensé à un accord comme celui-là. »

Un accord à maîtriser cependant. « Avec deux précautions, poursuit Armen Pretrossian. Il faut que le caviar soit corsé et fort en goût, comme l’Ossetra (esturgeon russe - clair, ferme, puissant, et équilibré) et l’Alverta (esturgeon blanc - ferme, complexe, long en bouche) car s’il est trop doux comme le Baeri (esturgeon de Sibérie - peu iodé, ample et doux) le cognac prend inévitablement le dessus et, d’autre part, que le cognac ne le soit pas trop boisé. Pour dire deux mots sur le cognac, il y très longtemps, il y avait un produit, tombé aujourd’hui en désuétude, qui s’appelait la fine à l’eau (un cognac allongé à l’eau) — ce qui revient finalement au même que de le frapper puisqu’on le dilue là aussi par l’adjonction de glace — que l’on consommait également pour les repas. C’est assez intéressant de revenir à cette idée ancienne qui, par ailleurs, a relancé la consommation du cognac en Asie où il est bu le plus souvent avec de l’eau de Seltz au grand damne des puristes... »

Mais revenons à l’accord. « Quand on additionne de glace assez fortement le VS, on atténue la sensation d’alcool et de boisé du cognac jeune pour le marier avec le côté maritime et iodé du caviar, tout en lui donnant une fraîcheur en bouche car le cognac a une toute autre texture frappé que chambré. Sa viscosité fait écho au caractère beurré de du caviar, conclut Armen Petrossian. »

Si le VSOP, plus marqué par le bois, trouve difficilement ses marques sur le caviar, l’XO, quant à lui, trouve l’accord en mode majeur. Le gras du caviar enveloppe l’alcool du cognac qui révèle son côté pâtissier et la toute la complexité de ses arômes. Une explosion en bouche, des notes de brioche beurrée avec une pointe rancio et une incroyable longueur tant pour le caviar que pour l’XO. Une pure gourmandise !

« D’ailleurs, il en va un peu de même, rebondit Armen Petrossian, avec le champagne. Il faut prendre soit un champagne jeune, mais extrêmement bien vinifié de telle manière à avoir un attaque sans astringence qui viendrait tout casser ou des champagnes de vinothèque qui permettent des appariements magnifiques. »

Pour résumer, l’entente, entre le Cognac & Caviar, est parfaite pour peu que l’on choisisse un caviar fort en goût et un cognac faiblement boisé. Il faut prendre soit un VS dont la vivacité est adoucie par un léger ajout d’eau ou de glace pour un accord vif et marin, soit un XO dont le bois s’est fondu avec le temps pour un accord pâtissier et gourmand.

Un accord qui remet le cognac à table pour les fêtes dans un terre & mer entre le verre et l’assiette et allie les 4 éléments : le feu de l’alcool et la terre par ses arômes à l’eau, côté iodé du caviar, ainsi qu’à l’air, l’éther de ses saveurs, pour déboucher sur une symphonie en bouche…

Vous êtes prêts pour tenter ce saut de l’accord ? Alors, il ne vous reste plus qu’à le déguster !

203 vues0 commentaire
bottom of page