Les arrières saisons étant de plus en plus belles, Septième Goût décide de prolonger l'été en vous proposant un dernier lieu avec table pour vous échapper et partir à sa recherche.
Le songe de l’architecte
Il y a des lieux, aussi difficiles à trouver qu’à quitter, des lieux qui se méritent. Ainsi, Le Heredad de Beragu Hotel, niché au creux du mont Beragu au pied du village médiéval de Gallipienzo (Navarra), qui fait face à la réserve naturelle de la Caparreta et surplombe la « Fosse verte » du fleuve Aragon.
Ancien lègue foncier que le roi octroyait jadis à des soldats particulièrement valeureux à leur retour de guerre, cette « heredad », mot qui vient du verbe castillan heredar (hériter en Français), composée d’un ensemble de quatre maisons en ruine que Patxi Gómez Moro et Ramón Navarro Eyo ont acquises les unes après les autres à la fin des années 2000 pour se convertir depuis le printemps dernier en néo-hôteliers. Sept ans pour transformer en hôtel rural de charme (label Ruticae) cet « héritage » du passé avec le renfort et l’imagination de l’architecte donostiarra* Javier Guisasola Pérez-Garmendia. Sept années non pas pour ressusciter le passé de ces quatre maisons hétéroclites, mais pour, en les réunissant, imaginer ce qu’elles auraient pu être : une projection à partir du passé, une uchronie architecturale !
Et c’est sûrement la raison pour laquelle, on s’y sent si bien. Non seulement par ce que l’hôtel, restauré principalement avec des matériaux de récupération nobles, (à commencer par ceux des maisons elles-mêmes — poutres, pierres, tuiles), s’inscrit dans un cycle de développement durable, mais surtout par un surplus d’âme apportée par cette projection. Chacune des 9 chambres (dont une mini-suite), ayant toute une thématique propre, ont été rêvées avant d’être réalisée. Comme cette Bodega (La Cave à vin) où la salle de bain à été imaginée dans deux immenses et anciennes jarres de vinification, à part que l’on aurait jamais pu faire entrer une seule de ces jarres dans cette chambre… une réelle fiction architecturale plus vraie que nature.
Et puis il y a cette vue, inchangée depuis des siècles que contemplaient déjà les pèlerins qui empruntaient l'ancien chemin aragonais pour Compostelle passant en contrebas de l’hôtel, et dans laquelle on a juste envie de « s’abîmer » une fois rentré.
C’est pour cela que Ramón propose le soir une table d’hôte dans la salle à manger panoramique afin que chacun puissent en profiter jusqu’au dernier rayon sur une cuisine de terroir recréée à sa façon et que Patxi conjugue avec des vins de Navarre en priorité. Ses « manitas de cerdo como las hacía mi abuela » (pieds de cochon comme les faisait ma grand-mère) et sa sauce aux amandes permettent de s’arracher à la contemplation pour se reconnecter à des plaisirs plus terrestres.
Après, il ne reste plus qu'à aller humer l'air du soir qui se mêle aux odeurs des premiers feux de cheminée avant de s'installer confortablement dans le salon en dégustant un pacharán navarro** maison. Il n'y a pas de doute, l'automne arrive en pente douce, mais l'hôtel est ouvert toute l'année et cet hiver, il inaugurera son spa pour dorloter les corps après avoir ravi les âmes.
* Habitant de San Sebastian en Basque
** Liqueur à base de prunelles sauvage et d'anis doux
Calle el Abrigo, 12 31830 Gallipienzo (Navarra)
Tel : +34 948 050 109